Flamme de mon amour

1949

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Genre : Drame social

(Waga koi wa moenu). Avec Kinuyo Tanaka (Eiko Hirayama), Mitsuko Mito (Chiyo), Kuniko Miyake (Toshiko Kishida), Ichirô Sugai (Kentaro Omoi). 1h36.

En 1884, la célèbre militante Toshiko Kishida visite la ville d'Okoyama où Eiko Hirayama a fondé une école de jeunes filles. La manifestation en faveur des femmes prévue par la militante Kishida est dispersée par la police. Eiko, rentrée chez elle, découvre que Chiyo, la fille des domestiques de sa famille a été vendue à un habitant de Tokyo.

Peu de temps après, son école ayant été fermée par les autorités, Eiko se rend à Tokyo. Au quartier général du parti libéral, elle apprend que son ami de toujours, Hayase, membre de ce parti est devenu traître à la cause et un espion à la solde du gouvernement.

Eiko écrit pour le journal du parti et devient l'amie de Omoi, le chef local du mouvement. Le Premier ministre du Japon manœuvre pour dissoudre le partie libéral. Omoi n'arrive pas à convaincre le chef du parti de continuer la lutte. Celui-ci sous prétexte de demander l'avis des militants accepte la dissolution recevoir des avantages à titre personnel du gouvernement. Omoi et Eiko entrent dans la clandestinité.

A Chichibu a lieu la fameuse révolte des fermiers de la soie. Ils luttent notamment contre les horribles conditions de travail imposées dans les filatures. Omoi refuse une action violente et envoi Eiko en reconnaissance pour repérer les chefs de filatures. Eiko voit son amie Chiyo violée en essayant de résister aux conditions de ses chefs. Chiyo, humiliée, met le feu aux filatures. Elle est arrêtée avec Eiko et Omoi.

Au bagne des femmes, les prisonnières enchaînées deux à deux, transportent de lourdes pierres. Chiyo, enceinte, se donne à un gardien dans l'espoir d'obtenir un moyen d'évasion. Au lieu de cela, elle est violemment frappée et son bébé meurt. Le père de l'enfant est l'homme qui l'avait acheté et qu'elle aime car dit-elle, c'est lui qui l'a faite femme. Eiko repousse une nouvelle demande en mariage de Hayase, venu la voir au parloir. Il est devenu un gradé du régime. Elle retourne en prison.

En 1889 la constitution est votée. C'est l'amnistie. Le parti libéral renaît. Eiko se range aux cotes de Omoi devenu un héros de la liberté. Tous deux font croire qu'ils sont amants. Ils vivent ensemble aux yeux de tous mais Eiko refuse toujours les avance de Omoi. Eiko est de nouveau rédactrice du journal du parti et emploie Chiyo comme servante de sa maison alors qu' Omoi se présente à la députation.

Un jour, l'acheteur et le premier amant de Chiyo vient faire scandale au siège du parti pour réclamer Chiyo qu'il sait, dit-il, être la maîtresse de Omoi. Eiko le fait taire. Rentrée à la maison, elle découvre bien que Omoi et Chiyo sont amants. Omoi qui lui rappelle ses refus d'être sa femme est prêt à quitter Chiyo si Eiko veut bien l'épouser.

Comprenant que si elle accepte, elle sera contrainte au rôle d'épouse et Chiyo à celui de femme délaissée sans que la cause des femmes ne trouve plus personne pour la défendre, Eiko décide de retourner à Okayama pour fonder son école de jeunes filles sur des bases solides. Elle quitte Omoi vainqueur aux élections.

Dans le train qui la ramène vers sa ville natale, tous s'extasient sur le courage d'Omoi et envie la personne qui pourrait partager sa vie. Eiko sachant la longue marche qui l'attend, couvre ses épaules de son grand châle blanc. Derrière la porte du compartiment voisin apparaît soudain Chiyo. Elle a compris le sens de la lutte de Eiko, l'en remercie et décide de l'accompagner à Okoyama.

Pour Jacques Lourcelles "Flamme de mon amour est sans doute l'un des premiers et l'un des meilleurs films féministes jamais écrits."

Le ton du film n'est jamais tragique ou désespéré, la succession des malheurs qui s'abattent habituellement sur les femmes chez Mizoguchi concerne en effet plutôt le personnage secondaire de Chiyo dont le parcours viendra rejoindre in extremis celui de Eiko. Celle-ci est habitée par son combat et prête à perdre la vie pour le mener jusqu'au bout. Son esprit de sacrifice, sa rigueur inébranlable en font un personnage digne de Jeanne d'Arc dont, emblématiquement, elle traduit la biographie pour le journal du parti.

Son combat l'écarte longtemps de tout sentiment amoureux. Elle repousse d'abord la demande en mariage de son ami Hayase puis celle de Omoi. Lorsque au soir de leur libération, tous, Omoi compris, s'attendent à ce qu'ils fassent enfin l'amour, Eiko se dérobe.

Mais ce trait de caractère lui permet d'être la championne de son combat. Si elle succombe, les femmes, suivant son exemple, auront toujours la seconde place. Elle atteint ainsi à la grandeur tragique lorsque le sentiment amoureux qui a mis longtemps à éclore doit être repoussé au nom du combat de toujours.

Par voie de conséquence, les personnages masculins ne sont jamais caricaturés. Omoi étant seulement le produit de son époque.

Plastiquement, le film est superbe. Aux grands travellings qui accompagnent les processions et luttes des féministes du début succéderont ensuite une succession de plans-sequences. Tous les sentiments des personnages s'expriment par leur déplacement dans le plan. Le travail de mise en scène consistant à figurer la violence des sentiments qui les anime par des passages de l'arrière-plan à l'avant-plan, par des trajectoires contrariées lors des entrées ou sorties de champ ; Eiko et Omoi étant repoussés ou projetés sur le devant de la scène par d'autres personnages.

Jean-Luc Lacuve le 20/02/2007

critique du DVD
Editeur : Carlotta, juin 2007. Langue : japonais. Sous-titres : français. Son : mono. Format : 1,37.
Coffret Mizoguchi les années 40

Coffret 3 DVD, 5 films : DVD1 : Cinq femmes autour d'Utamaro. DVD2 : L'épé Bijomaru et L'amour de l'actrice Sumako. DVD3 : Les femmes de la nuit et Flamme de mon amour.