Wanda

1970

Avec : Barbara Loden (Wanda), Michael Higgins (Monsieur Dennis), Dorothy Shupenes (la soeur de Wanda), Peter Shupenes (son beau-frère), Jerome Thier (Son mari), Marian Thier (Mme Godek), Anthony Rotell (Tony), M.L. Kennedy (Le juge). 1h42.

Wanda vit chez sa soeur, qui l'a recueillie, car elle a quitté son mari, un mineur de Pennsylvalie, et ne s'occupe plus de ses deux enfants. Le divorce est prononcé à ses torts, ce qui la laisse quasi indifférente. Son employeur la trouve trop lente et la licencie.

Elle quitte la région en auto-stop, passe une nuit pas très reluisante avec un commis-voyageur, se fait voler ses économies dans un cinéma, puis entre dans un bar qu'un homme est en train de cambrioler. Elle le suit, ou plutôt il se laisse suivre. Elle s'attache à ce « Monsieur » Dennis, quadragénaire revèche, qui la rabroue constamment ; elle devient sa maîtresse et même sa complice, dans des vols de voitures ou des hold-up minables. Entre eux, peu de mots, le plus souvent le silence, et quelques gestes, tendres ou violents. Un jour, il lui fait même un compliment.

Dennis rend visite à son père. Puis il organise aussi méthodiquement que possible le hold-up d'une banque, dans lequel Wanda, d'abord réticente, accepte ensuite de jouer un rôle important. Le plan se déroule d'abord comme prévu avec la séquestration de la famille d'un directeur d'agence. Mais Wanda, qui doit rejoindre Dennis sur les lieux, est retardée par un contrôle policier et arrive en retard à la banque, pour constater que les choses se sont mal terminées : on sort Dennis sur une civière et elle apprend peu après sa mort par la télévision.

Wanda reprend son errance solitaire, échappe de justesse à un militaire qui la drague et se montre entreprenant. La nuit tombée, elle trouve refuge dans un bar et boit avec des gens de rencontre, alors que joue un groupe de musique country.

 Le film, inspiré par un fait divers autour d'un couple de malfaiteurs minables, reflétait, d'après les dires de la réalisatrice, certains de ses propres états d'âme : l'indifférence au monde, le renoncement, le silence. Celle-ci, la comédienne Barbara Loden (1932-1980) fut la réalisatrice-interprète de ce seul film et mourut à 48 ans d'un cancer.

Elle était la femme d'Elia Kazan, qui la fit tourner dans deux de ses films: un petit rôle dans Le fleuve sauvage (1960) et la soeur de Bud dans La fièvre dans le sang (1961) puis la dirigea au théâtre dans des pièces d'Arthur Miller et Tennessee Williams.

Le cinéaste confiait à Michel Ciment dans Kazan par Kazan qu'il s'était contenté de donner quelques conseils à Barbara Loden lors du tournage de Wanda, de faire un peu d'assistance technique et de... s'occuper des enfants ! Mais il avait été frappé par le travail en petite équipe, en toute liberté, loin de la pesanteur et des contraintes du système hollywoodien, au point qu'il réalisa son film suivant, Les Visiteurs (1972), de cette façon, avec, notamment, Nick Proferes à la photo en 16 mm couleurs gonflée.

Présenté au Festival de Venise 1970, le film y remporta le Prix de la critique. Il est sorti en France en 1975, puis en 1982, avec le soutien d'artistes et de cinéastes, dont Marguerite Duras qui admirait beaucoup le film, et enfin en 2003, grâce cette fois à Isabelle Huppert.