Jayro Bustamante

Né en 1977
3 films
   
   
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Créée en 2009, la société Casa de producción se lance dans la production alors que le cinéma émerge à peine au Guatemala, un pays où les histoires s’entassent en silence et où de jeunes talents cherchent comment s’exprimer. La société commence par produire trois courts-métrages qui sont couronnés dans des festivals à travers le monde, ainsi que deux documentaires. Elle passe à la fiction en produisant « Ixcanul » en 2015, « 1991 » en 2018, et « Tremblements » en 2019. Aujourd’hui, cette société est bien établie dans le milieu du cinéma indépendant, et s’engage sur des projets qui refusent de se laisser censurer, auxquels elle apporte une structure. « Ixcanul » a remporté l’Ours d’argent au festival de Berlin, et plus de 50 prix à travers le monde. C’est le premier film représentant le Guatemala auprès des Oscars et des Golden Globes.

Je suis né en 1977 au Guatemala, de deux parents guatémaltèques, qui ont des origines espagnoles,très mélangées du côté de ma mère, et un peu moins du côté de mon père. Mes deux parents étaient médecins. Je suis né à Guatemala City, qui est la plus grande ville du pays, et quand j’étais tout petit, ma mère m’a emmené vivre dans les hauts plateaux du Guatemala, près d’un lac magnifique, entouré par trois volcans. Il y en a environ trente-trois dans le pays. Ma mère est partie là-bas parce qu’elle finissait ses études de médecine, on était en pleine guérilla, elle n’avait pas de travail et elle était mère célibataire. Donc on lui a proposé la direction d’un hôpital, elle s’est lancée, et on s’est retrouvés dans le cœur de la guérilla. On vivait en face de la mairie, où il y a l’église et l’hôpital. Elle partait travailler, elle me laissait là avec la nounou. Mais il y avait souvent des affrontements, et les balles traversaient les murs des maisons. Donc elle m’avait fait construire un parc pour enfants en métal pour que je puisse jouer en étant protégé des balles. J’ai vécu là jusqu’à mes quatorze ans.

. J’ai passé un bac avec option publicité pour aller vers la réalisation, parce qu’au Guatemala il n’y avait pas d’école de cinéma. Après je suis parti étudier la communication à l’université de Guatemala City. J’ai quitté les hauts plateaux, je suis allé vivre chez mon père, je suis vite devenu indépendant, et j’ai obtenu un stage dans une agence de publicité. Puis je suis devenu assistant du directeur artistique, on a eu le gros budget de la téléphonie publique qui devenait privée, et j’ai appris à faire des films de pub. J’ai économisé de l’argent pour venir en France. Pourquoi la France ? C’était mon rêve. La Nouvelle Vague m’attirait. Je suis arrivé en 1999. J’ai essayé d’entrer à La Femis. Mais quand tu es étranger, il faut que tu aies d’abord passé un examen dans ton pays d’origine. Seulement, au Guatemala, il n’y avait pas d’examen à passer. J’ai essayé de rentrer à l’université, à Jussieu, qui proposait des cours de cinéma. Là, j’ai rencontré un doyen qui m’a conseillé d’aller plutôt dans le privé, et il m’a donné une liste d’écoles privées qui étaient super chères. Je suis allé voir chacune, et je suis rentré dans celle où j’ai pu négocier de payer par mois, et non par semestre ou par an. Je travaillais dans une boutique de souvenirs, où j’étais payé en partie au noir. Et c’est comme ça que j’ai payé mon école, parfois en apportant plus de pièces que de billets… J’y suis resté trois ans. Venant du Guatemala, où parler d’un film signifie seulement résumer l’intrigue, j’avais vraiment besoin de théorie sur le cinéma, besoin qu’on m’apprenne à analyser un film, besoin qu’on me cadre sur ce que le cinéma représentait, au-delà de mon rêve un peu fou.Après ça j’ai gagné une bourse, organisée par l’Union Latine, une association qui réunit tous les pays issus de la langue latine. La bourse consistait à passer un an à Rome pour un master en écriture, mais où l’on confrontait aussi l’écriture et le montage, ce qui était passionnant. J’ai eu la chance de rencontrer le monteur de “Padre Padrone” et le scénariste de Fellini. Ensuite, je suis revenu en France, où un de mes amis à l’école de cinéma était devenu producteur. On a fait un court métrage d’animation, image par image, en stop motion. C’était inspiré d’un film que j’avais fait tout seul à partir d’une collection de poupées complètement dingue dont un ami avait hérité. J’en avais fait un petit film d’animation que j’ai montré à ce producteur et on a refait le film ensemble.Après ça je suis retourné au Guatemala pour faire d’autres projets là-bas, dont mon dernier court, qui a été un peu le premier pas vers la constitution de l’équipe que l’on forme aujourd’hui, avec mon chef opérateur notamment. J’ai rencontré des gens qui eux aussi revenaient de Mexico, de Cuba ou des Etats-Unis, où ils avaient aussi étudié le cinéma. On s’est tous retrouvés au Guatemala.

Filmographie :

2015 Ixcanul

Avec : María Mercedes Croy (Maria), María Telón (Juana), Manuel Antún (Manuel), Justo Lorenzo (Ignacio). 1h31.

Maria, jeune Maya de 17 ans, vit avec ses parents dans une plantation de café sur les flancs d’un volcan, au Guatemala. Elle voudrait échapper à son destin, au mariage arrangé qui l’attend. La grande ville dont elle rêve va lui sauver la vie. Mais à quel prix...

   
2019 Tremblements

(Temblores). Avec : Juan Pablo Olyslager (Pablo), Diane Bathen (Isa), María Telón (Rosa) Mauricio Armas (Francisco). 1h47.

Guatemala, Pablo, 40 ans, est un "homme comme il faut", religieux pratiquant, marié, père de deux enfants merveilleux. Quand Il tombe amoureux de Francisco, sa famille et son Église decident de l’aider à se "soigner". Dieu aime peut-être les pécheurs, mais il déteste le péché.

   
2019 La llorona
Avec : María Mercedes Coroy (Alma), Sabrina de La Hoz (Natalia), Julio Diaz (Enrique), Juan Pablo Olyslager (Letona). 1h37.

La Llorrona : seuls les coupables l’entendent pleurer. Selon la légende, la Llorona est une pleureuse, un fantôme qui cherche ses enfants. Aujourd’hui, elle pleure ceux qui sont morts durant le génocide des indiens mayas. Le général, responsable du massacre mais acquitté, est hanté par une Llorona. Serait-ce Alma, la nouvelle domestique ? Est-elle venue punir celui que la justice n’a pas condamné ?