L'histoire de Bacchus et d'Ariane, jusqu'alors peu représentée, avait inspiré les poètes latins Ovide et Catulle. Le commanditaire a probablement fait parvenir à Titien, en même temps que les toiles et les cadres, des extraits traduits de leurs uvres. Jamais texte ni mythe païen n'ont été mis en scène de manière aussi tapageuse, ni avec un tel déploiement de pigments rares et précieux - qui n'étaient du reste disponibles qu'à Venise.
Après avoir aidé Thésée à vaincre le Minotaure, Ariane quitte la Crète avec lui. A Naxos, Thésée l'abandonne cependant sur le rivage. On voit ici son navire s'éloigner sur la gauche. "Sur tout le rivage, retentirent ensuite à un rythme endiablé cymbales et tambours" : ils annonçaient l'arrivée d'un char tiré par des guépards, de Bacchus et de sa suite déchaînée composée de ménades, de satyres - dont l'un, "ceint de serpents contorsionnés", et de Silène ivre, accroché à son âne. Voix, couleur, et Thésée, tout avait quitté Ariane, terrorisée au moment où le dieu saute de son chariot pour l'emporter et en faire son épouse. Elle deviendra la constellation représentée ici au-dessus d'elle. Bacchus et Ariane qui se détachent sur un fond outremer, sont animés du même élan, auquel fait écho le mouvement des cymbales tenues par la ménade à la tunique orange, qui semble être le pendant d'Ariane. Le petit chien aboie : il est excité par la présence du faune qui, du jasmin dans les cheveux, se pavane tout en tirant une tête de veau auprès d'une fleur de câpre symbolisant l'amour.