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Portrait de Baldassare Castiglione

1515

Portrait de Baldassare Castiglione, écrivain et diplomate
Raphaël, 1514-1515
Huile sur toile, 82 x 67 m
Paris, Musée du Louvre, Aile Denon 1er étage Grande Galerie

La discrétion et l'élégance du costume, la présence intense mais simple et naturelle du modèle font de ce portrait de Castiglione, auteur du Livre du courtisan (publié en 1528) et ami de Raphaël, l'incarnation par excellence, en peinture, du gentilhomme accompli, du parfait homme de cour décrit dans cet ouvrage. Ce tableau fut probablement peint à Rome en 1514-1515, à l'occasion de l'ambassade dont le duc d'Urbin avait chargé Castiglione auprès du pape.

Balthazar Castiglione

Le modèle de ce portrait est Baldassare Castiglione (1478-1529), poète, humaniste et ambassadeur du duc d'Urbin, dont Raphaël avait fait la connaissance dans sa jeunesse, à Urbin même. Resté célèbre comme auteur du Livre du courtisan, publié en 1528 et consacré au portrait de l'homme de cour idéal, Castiglione était devenu l'ami de Raphaël et tous deux partageaient une même conception de la beauté et de l'harmonie

Une incarnation du courtisan

Cette affinité s'exprime parfaitement dans le portrait étonnamment simple et naturel de Raphaël, peint sans doute à l'intention du modèle lui-même. Castiglione est représenté dans un costume d'une élégance et d'une discrétion remarquables, accordées à sa conception de la mise du gentilhomme accompli : coiffé d'un turban enserrant la chevelure sur lequel s'ajuste un béret à bords découpés et orné d'une médaille, enveloppé d'un pourpoint sombre garni, sur le plastron et le haut des manches, d'une fourrure grise d'écureuil retenue par un ruban noir, ouvert sur une chemise blanche bouffante. Cette tenue hivernale permet de supposer que le portrait fut peint pendant l'hiver 1514-1515 lorsque Castiglione, chargé par le duc d'Urbin d'une ambassade auprès du pape Léon X, se trouvait à Rome, où Raphaël était actif depuis 1508.
L'harmonie sobre de ce costume, contenue entre le noir, le gris et le blanc, se prolonge dans le fond du portrait, d'un gris beige clair et chaud, baigné d'une lumière diffuse dans laquelle s'estompe insensiblement, sur la droite, l'ombre portée du modèle. L'ensemble est ourlé, comme dans d'autres tableaux de Raphaël, par une étroite bande noire qui délimite la composition, coupant délibérément le motif des mains et concentrant l'attention du spectateur sur le visage et son intense regard bleu.

Un portrait naturel

L'attitude de Castiglione, vu en buste, assis dans un fauteuil esquissé dans l'angle inférieur droit, saisi de trois quarts vers la gauche, le regard dirigé vers le spectateur et les mains jointes au premier plan, de même que l'enveloppe lumineuse adoucie du portrait, sont un hommage subtil, libre et plein d'aisance, à La Joconde. Raphaël ne manqua certainement pas de la voir alors dans ces années où Léonard était présent à Rome avant de partir pour la France. Mais l'atmosphère des deux oeuvres, et sans doute aussi l'ambition des deux peintres dans ces deux portraits, diffèrent profondément : en se référant à son portrait peint par Raphaël dans une élégie latine dédiée à son épouse, Castiglione lui-même évoquait la force de sa ressemblance et le sentiment de présence qui s'en dégage. Plus que tout, c'est le naturel, l'instantanéité, l'immédiateté, la liberté de l'attitude, la vivacité de l'expression qui font l'extraordinaire modernité de ce portrait grandeur nature.

Cécile Scailliérez, musée du Louvre

 

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