L'année 1949 est une année charnière pour Fontana. C'est en effet à cette date qu'il aborde pour la première fois la peinture en perçant de trous (buchi) la toile ou le papier à l'aide d'un clou ou d'un poinçon. Dans ce cas, il s'agit pour Fontana (qui avait été jusqu'à présent seulement sculpteur ou céramiste) de «se libérer d'une forme plastique statique» (cat. exp., Paris, 1987-1988, op. cit. , p. 372). De 1950 à 1958, les « Concetti spaziali » à trous constitueront la part majeure de son travail.
La radicalité du geste de Fontana peut faire songer à un projet de destruction de la peinture. En réalité, conformément aux déclarations utopiques du Manifeste blanc de 1946, il s'agit d'un projet de dépassement de la peinture qui, pour l'artiste, doit acquérir une «nouvelle dimension comme idée et comme volume» : le trou, selon Fontana, est hors des dimensions du tableau, c'est «l'espace libre» (c'est-à-dire l'infini) conquis par un geste, net et sans retour, offrant des perspectives inédites à l'art, resté jusqu'à présent écartelé entre peinture bidimensionnelle et sculpture tridimensionnelle.
Sur les premières œuvres perforées des années 1949-1952, les trous, tantôt réalisés à l'endroit du support, tantôt au revers, sont disposés sur des fonds parfois unis, parfois grossièrement colorés. Leur taille est réduite et leur disposition très variable, en lignes concentriques, ondulantes, brisées, ou, comme c'est le cas dans le Concetto spaziale 50-B.l, en constellation. Ces premières toiles perforées visualisent avec la plus grande rigueur l'idée fondatrice de l'artiste, qui a pu dire dans une interview : « Ma découverte a été ce trou et basta . Je peux mourir après cette découverte».
Source : Jean-Paul Ameline, Johan Popelard d'après Collection art moderne - La collection du Centre Pompidou, Musée national d’art moderne, sous la direction de Brigitte Leal, Paris, Centre Pompidou, 2007