Café Lumière : 0 coeur
(0*). Rejoignant Jibé, je dirais que ce film est une provocation
envers les ronfleurs. Le 1er plan plante assez bien le décor:
plan fixe qui dure une éternité, Yoko étend son
linge puis sort du cadre pour répondre au téléphone,
nous laissant admirer son oeuvre (mon Dieu! Que ton linge est propre,
Yoko!), ça commence bien. S'ensuit une succession de plans, il
est vrai jolis, mais atrocement chiants du fait de leur longueur, de
la quasi-absence de musique et de dialogues, et de l'inintérêt
total de ce qui est filmé (Yoko prend le train, Yoko mange, Yoko
remange, et Yoko reprend le train, elle va au cimetière, puis
elle reprend le train et elle remange et elle reprend le train). J'ai
été tellement traumatisé en allant voir ce film
que je me suis demandé si je retournerais un jour au cinéma.
Quel ennui! Ceci dit, ce film peut peut-être trouver son utilité
en offrant un traitement sadique à des enfants hyperactifs.
Le convoyeur 1* Troublant Albert Dupontel.
Il suffit qu'il soit là et tout paraît crédible. C'est la marque des
grands acteurs que d'avoir une telle présence. De plus, j'aime le personnage.
J'aime son côté légèrement réac qui le rend anachronique à l'heure du
règne de l'hypocrite politiquement correct. Le convoyeur est un thriller
d'entreprise, un téléscopage entre Légitime violence et Ressources humaines,
le tout cramé au gasoil amer qui a fait rouler Taxi Driver en 1976.
Nicolas Boukhrief pose sa caméra dans le monde du travail, un univers
sous pression, une boîte qui vient de se faire racheter, des suppressions
de postes à la clef. Mais qui est donc cet Alexandre qui vient s'enrôler
dans cette société de transport de fonds? Que cherche-t-il? Pourquoi
vit-il à l'hôtel? Pourquoi est-il si sombre et taciturne? L'intrigue
se révèle peu à peu, jusqu'à un final explosif et sanglant. Un bon film
noir.
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2046 : 1 *. C'est l'histoire d'un écrivain qui
choisit comme exutoire de sa vie sentimentale d'écrire des histoires
sur des mecs qui sont coincés dans une pub LG. Plus sérieusement, même
critique que Jibé, il y a de jolies choses, mais était-il besoin d'étaler
ça sur plus de 2h? Et était-il utile de multiplier autant les ralentis?
Et puis les pubs pour LG sont vraiment trop voyantes. Bref, Wong Kar-Waï
excelle dans l'esthétisme et l'ennui, ce qui me transcende difficilement.
Dig! : 3 coeurs. Il fait chaud,
singulièrement chaud pour une fin de mois d'avril. Mes aisselles moites
commencent à manifester leur dédain pour la bienséance en émettant des
effluves salées chargées de phéromones dont l'efficacité reste à prouver.
Mais on s'en fout, je suis pas là pour lever. J'ai ce soir enfin l'occasion
de voir le documentaire tant attendu qui a cassé la baraque à Sundance.
Le Tarnation rock, mêlant 7 années de rushes sur les groupes psyché-pop-rock
que sont les Dandy Warhols de Portland et les Brian Jonestown Massacre
de Frisco. Ça vaut bien la peine de craquer encore un peu sur la clope
après 4 mois de sevrage intermittent, comme ça je puerai pas seulement
des dessous de bras et personne ne viendra m'empêcher d'étaler mes guibolles
dans la minuscule salle de projection taillée pour des nabots qui se
seraient arrêtés de grandir à l'âge où mon hypophyse s'est décidée à
s'activer sur la sécrétion de GH. Et dès le premier plan, des accords
harmonieux viennent titiller mes gonades pour 1h47 d'érection symphonique.
Je reconnais la gueule de minet de Courtney Taylor, faiseur de mélodies
efficaces qui ne sont pas plombées par des paroles lubriques pour qui
ne comprend pas la langue du regretté Hunter Thompson. Je découvre celle
tourmentée d'Anton Newcombe, mégalo capricieux génial dont les démons
exacerbés par moult substances diversement pénalisées dans le temps
et l'espace élèvent un rempart perpétuel sur la route d'un succès qui
semble pourtant lui tendre les bras. Ils sont d'abord amis, jouent ensemble,
s'inspirent l'un l'autre. Le premier végète dans son pays, mais finit
par exploser en Europe. Le second se complait à anéantir par son comportement
psychotique tout ce que ses dons couvrent d'or. Les Dandy mènent leur
chemin dans une décontraction équilibrée en acceptant les règles de
l'industrie du disque. Les BJM subissent les frasques de leur leader
ultra prolifique qui les insulte et les castagne sur scène à la moindre
contrariété, poussant certains à quitter le groupe en plein milieu d'un
concert. Comme il ne peut décidément pas accepter la réussite qu'il
désire pourtant plus que tout, il s'en prend à ses amis de Portland
dont il jalouse le succès, jusqu'à écrire une chanson ridiculisant leur
tube Not if you were the last junkie on earth (Not if you were the last
dandy on earth). Au final, Anton, que je ne connaissais pas avant ce
film, est malgré son attitude détestable presque plus attachant que
le groupe dont je suis fan depuis Come Down. Un documentaire indispensable
pour qui a su ménager, malgré la corrosion du temps et la fréquentation
débilitante du monde du travail, les graines rock de son adolescence.
Dogville : 3*. Les décors minimalistes
choquent d'abord, avant de paraître très vite naturels,
voire indispensables tant l'absence de hors champs qu'ils entraînent
apporte beaucoup au film. Ensuite, Dogville est un conte, ce qui semble
être passé au-dessus de la tête de ceux qui jugent
l'histoire manichéenne, un conte misanthropique, où le
personnage de Nicole Kidman a une attitude quasi-christique dans sa
façon d'accepter les souffrances que les habitants de Dogville
lui font subir, comme faisant partie intégrante de leur humanité,
mais contrairement au conte évangélique, l'héroïne
ne rachète pas les péchés de cette communauté,
mais verse elle aussi dans la sauvagerie. Un film terriblement misanthropique,
donc, et aussi incontestablement le meilleur film de l'année
2003.
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Eternal sunhine of the spotless mind : 3 * (Après le
génial Being John Malkovitch, le jouissif Human Nature, Adaptation
que je suis a priori le seul à avoir aimé, et Confessions
of a dangerous mind que je n'ai toujours pas vu, voilà le dernier
film issu d'un scenario né de l'imagination fertile de Charlie
Kaufman. Les flashbacks sont traités de façon originale,
puisqu'ils sont racontés en filigrane de la lutte que mène
Joel contre le processus d'anéantissement des souvenirs liés
à son ex, Clementine. Pour le reste, l'histoire d'amour peut
paraître d'une éprouvante banalité pour qui reste
frigide à l'eau de rose, mais elle ne sert que de prétexte
à Kaufman pour nous emmener dans les méandres de son esprit
dérangé (la façon dont la mémoire de Joel
est mise en scène m'a franchement fait penser à un délire
de mec défoncé). Sinon, Jim Carrey m'a moins énervé
que d'habitude et j'ai découvert que je n'étais finalement
pas insensible au charme de Kate Winslet, ni a celui de Kirsten Dunst.)
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Massacre à la tronçonneuse, le remake : 0. Cinq
jeunes amerloques au début des seventies se font un à
un trucider par un texan au masque de cuir humain à l'aide de
sa tronçonneuse. C'est à peu près tout ce que ce
pseudo remake a en commun avec l'original, qui n'est pas, comme l'a
écrit le débile profond qui sévit dans les pages
cinéma des Inrocks un classique du film gore crade, puisque les
scènes sanglantes y sont surtout suggérées. Qu'importe,
le débile en question n'en est pas à sa première
imposture intellectuelle, il n'a probablement pas vu le film de Tobe
Hooper, mais ça ne l'empêche nullement d'écrire
dessus car, on le sait, les pages ciné des Inrocks se lisent
comme on regarde un film Z : au 88e degré.
L'original était donc moins un film sanglant qu'un film qui dérangeait
par certaines scènes éprouvantes et malsaines vous prenant
aux tripes pour provoquer petit à petit une indicible nausée.
Or, toutes ces scènes ont été zappées dans
ce cinquième opus : celle du cimetière profané,
par laquelle commençait l'original, celle de l'auto-stoppeur
qui s'ouvre la main dans le van, le speech de ce dernier sur les abattoirs
(cet auto-stoppeur, membre de la famille cannibale, a tout bonnement
disparu pour être remplacé ici par une victime écervelée),
la visite de la maison de l'oncle de l'héroïne et de son
frère impotent (qui a lui aussi disparu dans cette version),
et surtout le repas dans la maison des fous furieux, avec toute la famille
réunie, dont le grand-père zombie (qui est dans ce cinquième
volet bien revigoré malgré le fait qu'il n'ait plus de
jambes), aucune de ces scènes fortes qui donnaient tout son intérêt
à l'original n'est reprise. Des personnages ont été
rayés du scénario, d'autres ont été ajoutés,
même les noms des protagonistes ont été changés.
Un des producteurs a déclaré qu'il avait voulu faire ce
film car "une grande partie du jeune public n'a jamais vu le film
original. Ils ignorent de quoi ils se privent ! C'est une des émotions
les plus puissantes que l'on puisse avoir dans une salle obscure."
Voilà donc la véritable motivation des producteurs : faire
de l'argent en touchant les jeunes ricains trop englués dans
leur paresse intellectuelle pour découvrir par eux-mêmes
les classiques du 7e art. Il aurait été plus judicieux
de ressortir l'original en salle, cette option aurait certainement été
moins lucrative car moins alléchante pour ce jeune public, mais
elle nous aurait permis de voir ou revoir un véritable classique
du film d'épouvante sur grand écran, et nous aurait évité
d'avoir à subir un navet se vantant malhonnêtement d'en
être un remake fidèle. Alors, plutôt que de vous
conduire en Américains, si vous voulez découvrir Massacre
à la tronçonneuse, allez dans un vidéo-club et
louez l'original, ou bien conduisez-vous en Américains, attendez
qu'on vous fasse un remake-imposture pour découvrir les classiques
du cinéma, et vous pourrez alors peut-être postuler pour
écrire dans les pages ciné des Inrocks.
Mémoire d'un saccage : 4 * (un documentaire excellent sur la
descente aux enfers de l'Argentine, de la dictature militaire à aujourd'hui.
Révoltant.)
Michel Vaillant : 0. Jean-Sébastien nous a dit l'autre
jour au ciné-club : "C'est pas bon de voir que des bons
films, il faut aussi voir des navets de temps en temps". J'ai donc
décidé en conséquence d'aller voir un film de la
sphère Besson, et je n'ai pas été déçu.
Michel Vaillant est probablement le plus mauvais film que j'aie vu cette
année, tout y est insupportable tellement c'est peu finaud :
la photographie façon pub pour parfum, le scénario façon
Besson (vroum vroum les gentils, vroum vroum les méchants, huunn
les gentils ils sont vraiment gentils et les méchants ils sont
vraiment méchants), et toute cette pub omniprésente. Le
saviez-vous? Michel Vaillant il va manger chez McDo, eh ouais, et même
que si votre esprit est trop peu vif pour remarquer la double arche
sur le gobelet de coca eh ben c'est pas grave parce qu'ensuite il y
a un joli plan avec le McDo en arrière-plan, et puis Michel Vaillant,
il fait le plein de son prototype dans une station Total (parce qu'il
est gentil). Enfin bref, un film nul et bien lourd, LE film à
voir si vous voulez aller voir un navet, donc. Merci Jean-Seb, t'avais
raison, c'était un moment difficile, mais maintenant je me sens
tout léger pour aller voir Intolérable cruauté.
Le monde de Nemo .2 * A. Stantron, L. Unkrich. On a envie de
se laisser attendrir par cette histoire d'un père et son fils
qui se démènent pour se retrouver, mais je sais pas, tout
est plus ou moins attendu, ça manque d'originalité et
d'imagination. Un truc marrant : ce film a entraîné un
boom sans précédent dans la vente de poissons-clowns dans
le monde, ce qui semble démontrer que son public écervelé
s'est plus identifié à l'ignoble gamine à qui Nemo
doit être offert qu'à Nemo lui-même.
Le monde selon Bush : 1 * (Le complément indispensable de Fahrenheit
9/11)
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Les sentiments : 0. Dans ce film, Noémie
Lvovsky prend le risque de mélanger comédie et drame.
La première partie est ainsi un vaudeville léger à
l'humour gnan-gnan un peu convenu bercé par une chorale qui se
révèle au fil des minutes de plus en plus insupportable.
Puis, dans la seconde partie, tout le monde chiale ou fait la gueule,
ce qui n'est pas pour atténuer notre ennui (d'autant que la chorale
est toujours là, et elle est toujours de plus en plus insupportable).
Au final, on se retrouve devant un film bâtard qui n'est ni une
comédie, ni un drame, mais une espèce de machin difforme,
comme une Maïté cinématographique, dont le seul but
semble être d'ennuyer le plus possible son public. Un bémol
quand même : Isabelle Carré est vraiment adorable.
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