A l'undercover - même sa famille ignore son projet - Roberto Saviano mêle le récit-vérité, le non-fiction novel inventé par Capote dans De sang-froid.
Né à Naples en 1979 et titulaire d'une licence de philosophie à l'Université de Naples-Frédéric II, il a été l'élève du grand historien du sud de l'Italie, Francesco Barbagallo. Il fait partie d'un groupe de chercheurs de l'Observatoire sur la Camorra et l'illégalité et collabore avec les journaux L'Espresso et La Repubblica.
Il enquête, depuis l'âge de 13 ans, sur la Camorra, système mafieux napolitain. Piratant les ondes radio des carabiniers, il parcourt Naples à Vespa à la recherche des crimes de la mafia. Diplômé de sciences politiques et titulaire d'une licence en philosophie à l'université de Naples Federico II, le jeune journaliste fait aussi partie d'un groupe de chercheurs de l'Observatoire sur le crime organisé et l'illégalité à Naples.
Gomorra, spon premier livre est un véritable succès en Italie, il se vend à plus de 1 200 000 exemplaires et a été un best-seller dans 33 pays. Pour ce livre, il remporte plusieurs prix : les prix Viareggio, Giancarlo Siani et Stephen Dedalus.Suite à la sortie de l'ouvrage, il est menacé de mort et bénéficie d'une protection policière.
Roberto Saviano a enquêté pendant plusieurs années sur les activités de la Camorra, l'organisation criminelle qui règne sur Naples et toute la Campanie. Une organisation moins connue que la mafia sicilienne mais bien plus dangereuse, car la mafia se pose comme un 'contre-Etat', a un code d'honneur et respecte certaines règles, alors que la Camorra est une forme 'd'entreprenariat' criminel dont le seul but est de maximiser ses profits, ses membres étant prêts à tout pour atteindre cet objectif. Elle constitue pour l'auteur l'avant-garde de l'économie mondialisée, dont elle pousse les mécanismes jusqu'à leurs conséquences les plus extrêmes. Les rapports avec la Chine et le rôle du port de Naples, l'importance du textile en Italie et au-delà, le trafic d'armes et de drogue, les activités de construction et l'immobilier... Passant en revue tous ces dossiers, Saviano présente des faits, des chiffres et des éléments concrets sur la portée de la criminalité au sein du 'Système', le véritable nom de la Camorra.
Après le Cosa Nostra de John Dickie, référence sur la mafia sicilienne, Gomorra s’avère tout aussi important, à propos cette fois de la Camorra, la mafia napolitaine. Avec ceci comme différence que l’essai de Roberto Saviano est aussi épidermique et impliqué que celui de Dickie était minutieux et universitaire. Loin de lui ôter de la crédibilité, cette implication de Saviano dans son sujet donne à ‘Gomorra’ une force dévastatrice, et l’écriture du jeune homme, qui n’a même pas trente ans, porte en elle toute la hargne, le désespoir et le courage de son auteur. Né à Naples dans les quartiers pauvres, Roberto Saviano a vécu les chantiers épuisants, le débarquement nocturne de caisses de marchandises illicites. Son récit n’est toutefois pas celui d’un camorriste, plutôt celui d’un type au coeur de l’action sans le vouloir qui, alors que tout le monde est sur son siège à regarder le spectacle, se trouve assis au milieu de la scène du théâtre. Du rapport entre les marques de luxe et les ateliers de couture de la Campanie, du trafic de drogue, un classique, au béton, un classique mafieux, en passant par l’extraordinaire histoire de ces déchets qui valent de l’or, Saviano nous entraîne sur ses pas, dans une cité cauchemardesque, où la violence et la mort dominent tout. Car contrairement à la discrète chape de plomb sicilienne, la Camorra, elle, ostentatoire et décomplexée, utilise ses plombs à la moindre occasion. Sans suivre de parcours fléché, l’auteur parvient à dresser un tableau effrayant et exhaustif du ‘Système’, parlant de son histoire, de son fonctionnement et même de sa culture en évoquant les femmes et le cinéma. Son écriture se mue en cri, et à ce titre certains passages sur la peur quotidienne ou sur son envie de justice prennent aux tripes. La justesse des mots, la violence latente de sa plume font de ce “Gomorrhe” non seulement un essai instructif au possible, mais aussi un livre intense, qui laisse abasourdi. (par Mikaël Demets)
"Le mot "Camorra" n'existe pas, explique l'écrivain Roberto Saviano. C'est un mot de flics utilisé par les magistrats, les journalistes et les scénaristes. Un mot qui fait sourire les affiliés (...) Celui que les membres d'un clan utilisent pour le désigner est Système : "j'appartiens au Système de Secondigliano". Un terme éloquent qui évoque un mécanisme plutôt qu'une structure." Car l'organisation criminelle repose directement sur l'économie, et la dialectique commerciale est l'ossature du clan. La nébuleuse de la Camorra se compose aussi bien de groupes avides, sans projet économique, que d'avant-gardes qui développent leurs affaires à toute vitesse et visent les sommets. Les femmes commencent à y jouer un rôle de plus en plus important du fait des nombreuses arrestations et des assassinats. Les clans gèrent de très nombreuses activités : extorsions de fonds - la Camorra reçoit de l'argent de la plupart des entreprises de la région sous forme d'un impôt appelé le "pizzo" - prostitution, contrôle de multiples activités légales telles que le commerce de fleurs, le commerce de viande, ramassage des ordures, jeux et boîtes de nuit, contrebande en tous genres (objets volés et contrefaçon), trafic de cigarettes, trafic de drogue en provenance du Maghreb, de la Turquie (héroïne, opium) et d'Amérique du Sud (cocaïne), fraude - après le tremblement de terre de 1980, la Camorra a détourné des millions d'euros sous couvert de reconstruction immobilière de la Campanie financée par l'Union Européenne, offres publiques de chantiers, gestion des déchets toxiques - qui a permis d'empoisonner de nombreux terrains agricoles et d'accroître le nombre de cancers.
2006
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