Présente

Fantasia de Wang Chao

 

Editeur : Blaq out. Février 2016. Durée du film : 1h23. Prix public conseillé : 14.95€

Supplément : Entretien avec le réalisateur (8 mn)

Une famille recomposée dans une ville industrielle chinoise. Lorsque les hospitalisations du père deviennent de plus en plus fréquentes et coûteuses, toute la famille se trouve ébranlée. La mère enchaîne les petits boulots et se démène pour trouver de l’argent, la grande sœur décide de travailler secrètement dans un bar et Lin, le petit frère, stigmatisé par la maladie de son père et rejeté par ses camarades, fuit l’école et se réfugie dans un monde rêvé, un monde fantasmatique, un monde de fantaisie.

Le film garde les traces de son premier scénario, intitulé Papa est malade, pour toute sa partie quasi documentaire sur la vie des petites gens à la périphérie d'une mégalopole chinoise soudain déstabilisées par la maladie du père. La longue errance du père suivi par le fils, les scènes à l'hôpital ou à la maison, le stand de vente de journaux ou la boite de karaoké sont constituées de séquences peu scénarisées.

Le physique particulier du jeune acteur principal, apparemment grand propre et lisse, mais aussi mutique et fragile a conduit à lui donner plus d'importance et à développer la partie au bord de la rivière où il erre réellement ou en rêve et qui constitue une sorte d'échappatoire au monde réel. Ces séquences sont filmées à la grue, en plan fixe ou en lents travelings dans une atmosphère irréelle : brouillard accentué avec de longues focales laissant l'arrière-plan des tours dans le flou ou en accentuant la couleur orange des réverbères dans les séquences nocturnes.

Dans le scénario, il était écrit que Lin dans la dernière séquence à l'hôpital, voyait son père partir vers la lumière. Mais au moment du tournage, il manquait de projecteurs pour faire l'appoint supplémentaire de lumière. Wang Chao a donc improvisé cette séquence heureuse de gymnastique, tirée de la 6e série des exercices du matin et pratiquée sous Mao.

Lin semble ainsi saisi d'une vision imaginaire où son père est heureux et l'honneur familial intact. C'est une réponse imaginaire au désarroi qui l'a saisi en découvrant son professeur avec sa mère sur le lit conjugal. Il n'est pas certain du tout qu'il tue son père à l'hôpital. Lin voudrait surtout le voir heureux tout comme il avait choisi de se réfugier auprès de ce père de substitution, en bonne santé, cheveux au vent sur le camion ou trompettiste sur le bateau. L'un et l'autre des pères disparaissent ensuite vraisemblablement. Il ne reste e à Lin que le souvenir de l'air de trompette qui se continue jusqu'au générique. La fin du film, où Lin reste seul au bord de l'eau, peut alors se comprendre comme un équivalent au plan final des 400 coups où le jeune Antoine reste seul devant la mer, en danger, incertain mais raffermi dans son imaginaire.