Sur le bord d'une route, une jeune femme s'interroge sur sa liberté possible alors qu'elle porte la chemise de son père, la jupe de sa mère et la ceinture de son oncle.
Après la mort de son père, Richard, dans un étrange accident de voiture, India, une adolescente, voit un oncle, Charlie, dont elle ignorait l'existence, venir s'installer avec elle et sa mère dans leur riche demeure. Charlie, rappelle à Evelyn son mari, Richard, en plus jeune, du temps où ils s'aimaient. Mme McGarrick, leur gouvernante, semble effrayée de cette venue mais elle ne tarde pas à disparaitre après qu'India ait surpris une conversation agitée entre elle et Charlie. Puis c'est la tante de Richard qui tente d'alerter Evelyn et India d'un danger qu'elle pressent. Evelyn, amoureuse de Charlie, ne la retient pas pour dormir et lui indique un hôtel. Charlie vient l'y tuer.
India est une jeune fille solitaire, première de sa classe, mais mutique et en proie aux insolences de la gente masculine. Seul Whip prend sa défense quand elle est chahutée par une bande un plus insolente que d'habitude. India découvre le corps de McGarrick dans le congélateur mais elle découvre aussi des lettres dans le tiroir de son père. Celui-ci cachait les lettres que Charlie écrivait à sa nièce à chaque étape importante de sa vie. India en est bouleversée. Alors qu'elle ramène les lettres dans sa chambre, elle découvre que les enveloppes portent le cachet d'une institution médicale.
India surprend sa mère se laissant embrasser par Charlie et fuit dans la nuit. Elle rejoint Whip qui ne tarde pas à vouloir lui faire l'amour et à tenter de la violer quand elle refuse. Charlie surgit alors au milieu de la nuit et immobilise Whip. En rentrant chez elle se doucher, India se souvient que Whip n'a pas été immobilisé mais étranglé par la ceinture de Charlie alors qu'il tentait de la violer et qu'ils l'ont ensuite enterré sous une lourde pierre ronde. La masturbation d'India mêle alors plaisir et meurtre.
Le shérif vient interroger India sur la disparition de Whip. Charlie l'aide à s'en sortir mais ils savent que le shérif s'inquiète aussi de la disparition de Mme McGarrick. India déclare à Charlie qu'elle le sait responsable de la mort de celle-ci et qu'elle s'inquiète de le voir porter les lunettes de son père qui auraient dû bruler dans l'accident. Charlie avoue alors avoir tué Richard. Le jour des dix-huit ans d'India, Richard était en effet venu le libérer de l'institution médicale fondée par sa famille dans un but apparemment philanthropique mais surtout pour le tenir au secret.
Alors qu'il avait huit ans, Charlie, jaloux de l'amour de Jonathan son frère de trois ans, pour son frère ainé Richard l'avait étouffé dans un trou de sable. Charlie était alors resté enfermé dans l'institution, déplaçant son amour frustré vers son frère en direction de sa nièce auquel il écrivait les lettres cachées par Richard. Richard espérait l'éloigner da sa fille mais Charlie s'était énervé et lui avait défoncé le crâne avec une pierre avant de mettre le feu à la voiture.
Charlie espère avoir suffisamment corrompu le sang de sa nièce pour qu'elle accepte de le suivre et s'en va tuer Evelyn. India surgit avec une arme et tue... Charlie. Elle abandonne néanmoins sa mère et s'en va avec la voiture de sport de son oncle. Arrêtée sur la route par le shérif elle lui enfonce un sécateur dans le cou. Elle cherche à l'abattre avec son fusil dans le champ où son sang gicle sur les fleurs. India s'interroge alors sur sa liberté possible avec un tel atavisme familial.
Pour son premier film américain, Park Chan-wook opte pour un thriller très formaliste, en attendant peut-être de mieux connaitre et percevoir sa patrie d'adoption. Avec Stoker, il réalise une variation sur L'ombre d'un doute d'Hitchcock où un oncle, Charlie, tente de corrompre sans qu'elle le sache sa nièce pour l'amener vers le crime.
Toute la beauté promise à India se transforme en sang et en meurtre. Ce thème est traité dès la mystérieuse introduction où l'on ne sait pas encore que les fleurs rouges ne sont que des fleurs des champs où le sang du shérif a giclé. Ce motif se retrouve avec les chaussures banches et noires d'enfant avant des chaussures de femme fatale, la glace chocolat vanille destinée à orienter India vers le congélateur où Charlie a enfermé le corps de la gouvernante McGarrick ou encore le joli jardin avec fleurs blanches et grosses pierres rondes se transformant en jardin mortuaire
La thématique de la corruption inconsciente et latente se trouve dans les motifs obsessionnels : le désir de glace jaillissant de l'effet visuel du livre où coquillage et mer se mêlent. des gestes des bras comme des papillons qu'India fait sur le lit sans savoir que Charlie les avait fait sur le sable où il avait enterré vivant Jonathan. Plus classiquement aussi, le film joue des hésitations entre réel et imaginaire : qui a donné la clé des lettres ? Sans doute McGarrick ou le jeu au piano à quatre mains ; Whip non pas immobilisé mais étranglé par une ceinture qui la contraint à dériver sa sexualité vers une masturbation sous la douche où le plaisir, presque douloureux, se lie au meurtre.
Jean-Luc Lacuve le 11/05/2013