Dans un monde qui n'est pas le nôtre, le Jugentai, des silhouettes de feu combattent : le populaire Iôzen et le terrible Kumatetsu. C'est le monde des bêtes qui veulent devenir des divinités.
Shibuya, le monde des humains. Ren, vient de perdre sa mère, morte dans un accident. Son père ayant divorcé, ce sont ses grands-parents qui ont obtenu la garde. Refusant d'aller chez eux, Ren fugue. Il est recueilli par Kumatetsu, guerrier venu de Jutengai, le monde des Bêtes, par un passage secret. Kumatetsu a en effet besoin d’un disciple pour prétendre au trône dans son combat qui l’oppose au populaire Iôzen. Kumatetsu, lui-même orphelin, n'a aucune éducation un peu sophistiquée et personne ne veut être son disciple. Tout juste a-t-il deux acolytes, le bonze Hyakushubo et Tatara. Ainsi Kumatetsu prend-il cet humain comme disciple malgré le tabou qui s'y attache. Les humains peuvent se laisser envahir par les ombres et provoquer des catastrophes.
L'apprentissage se passe mal tout d'abord tant Kumatetsu est trop rustre pour expliquer quoi que ce soit. Il parvient tout juste à renommer Ren : ce sera, son âge, neuf ans. Mais l’élève est aussi têtu et emporté que le maître. Il fait le ménage mais apprend de son maitre en l'imitant secrètement ; le balai remplaçant le sabre. Si bien qu'au fil des mois, Kyuta devient capable de le jauger et de le battre. Kumatetsu accepte alors un entrainement où il apprend lui-même autant que son élève.
Mais Kyuta a la nostalgie du monde humain ; de son père qu'il parvient à retrouver, des études pour étancher sa soif de savoir. Dans une bibliothèque où il est tombé sur Moby Dick il sollicite l'aide de Kaede pour l'aider à lire et bientôt une idylle nait entre eux. Découragé par la grossièreté de Kumatetsu, et l'inimitié de Jiromaru, l'un des fils de Iôzen, Kyuta décide de s'installer dans le monde des humains.
Il revient toutefois juste à temps pour le combat entre Iozen et Kumatetsu. Celui-ci perd d'abord mais, avec les conseils de Kyuta, gagne. Jiromaru ne supportant pas la défaite de son père, enfonce un sable dans le dos Kumatetsu. C'est la consternation générale : Jiromaru s'est laissé envahir par les ombres, c'est donc un humain.
Le vieux lapin sage et souriant à la tête de Jugentai fait avouer à Iozen qu'il a recueilli un bébé humain dont la frustration de ne pas ressembler à une bête est allée grandissante.
Kyuta décide d'aller dans le monde des humains sauver Jiromaru de lui-même. Celui-ci se transforme en baleine et il faut la transformation de Kumatetsu en dieu sabre pour que Ren/ Kyuta en vienne à bout. Il le ramène purgé des ombres dans le Jugentai. Lui-même, avec Kumatetsu devenu sabre dans son cœur, ira désormais vivre chez son père.
Le garçon et la bête commence un beau film d'initiation où est revendiqué le souhait des enfants de s'accomplir par eux-mêmes, d'établir un rapport d'égalité entre maitre et élève, l'un apprenant toujours quelque chose à l'autre. Pourtant, en maniant trop de thèmes, en durant trop longtemps, les messages s'effilochent. Reste la belle japonité du film.
Le quartier de Shibuya est le symbole d'un Tôkyô moderne moins affairiste que consacré aux loisirs. Quand Kyuta y revient adolescent, la caméra s'attarde sur l'énorme Starbuck qui fait l'angle aujourd'hui, et qui n'est pas là lors de son enfance. Le monde des bêtes semble plus invariant. Kyuta et Ichirohiko, le jeune fils du rival de Kumatetsu, prennent le thé ensemble en mangeant des yôkan, gâteau japonais par excellence, devant une forêt de bambou, et devant le cadre d'une porte coulissante des maisons traditionnelles. La scène presque irréelle, elle idyllique. C'est à ce moment-là que les personnages parlent de vouloir s'en aller d'ici, alors que le spectateur est devant une image splendide et très japonaise. Par contraste, les maisons et le reste du décor de Jutengai n'est pas très japonais. Y dominent des maisons en pierre dans des rues en pente faisant penser aux habitats méditerranéens.
Mamoru Hosoda s'est inspiré d'un célèbre conte japonais impliquant un enfant, Kintaro, élevé par une ogresse et affrontant des ours lors de combats de sumo. Il s'initie à la maitrise de sa force auprès des animaux et grandit, devenant un homme en dégainant son sabre. Hosoda aime aussi la figure du lapin. Dans Summer Wars (2009), le lapin était un animal puissant, habile et agile. Dans Le garçon et la bête, Hosoda met un lapin au sommet de la hiérarchie sociale : il donne l'impression d'être sage et très fort toute la première partie du film mais se révèle être un vieux papy, sympathique avant tout.
Jean-Luc Lacuve le 28/01/2016