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Cocorico ! Monsieur Poulet

1974

Genre : Road movie

Avec : Damouré Zika, Lam Ibrahim Dia, Tallou Mouzourane, Claudine Baba Noré, Moussa Diallo. 1h33.

Lam, dit " Monsieur Poulet ", a décidé de monter un commerce de vente de poulets dans les environs de Niamey. À bord d'une vieille 2 CV, lui et Tallou, son apprenti, rencontrent Damouré, un pêcheur à la ligne, qui souhaite s'associer à leur affaire. Après discussion, Damouré accepte de les accompagner une journée à titre d'essai.

Les trois hommes prennent la direction de la brousse, en quête de la matière première : les poulets. Mais leur voyage tourne vite à l'expédition hasardeuse et interminable. C'est d'abord la police qui réclame des assurances que Lam n'a pas, puis c'est la voiture qui tombe en panne. Les trois hommes trouvent refuge dans un village mais, à leur réveil, tous les habitants se sont enfuis.

Reprenant la route, les trois hommes sont soudain arrêtés par une femme-diablesse qui leur intime l'ordre de chercher avec elle un éléphant blessé. Une crevaison immobilise à nouveau l'équipage et, tandis que l'apprenti part faire réparer la roue, les autres font la sieste. Au réveil, la diablesse a disparu, mais Damouré est envoûté et un sorcier doit l'aider à retrouver ses esprits.

La 2 CV repart et traverse le fleuve, tirée par des aides. Arrivés sur l'autre rive, ils retrouvent la femme-diablesse, en quête d'hippopotames cette fois, qui emprisonne à nouveau Damouré sous ses charmes. L'apprenti le délivre grâce à un tuyau magique qui fait de la musique.

Le trio passe la nuit dans un nouveau village. Au matin, l'apprenti est retrouvé dans la hutte d'une femme mariée, ce qui provoque des discussions. Puis c'est l'arrivée d'un Français "expert en développement rural", qui débite d'incompréhensibles théories, prend Damouré pour le chef du village ce qui permet à Tallou de se procurer de l'essence.

Nos trois compères repartent et traversent le fleuve, dans l'autre sens. C'est à présent la saison des pluies, et la voiture avance difficilement dans les chemins boueux. Ils se lancent pour un temps dans le transport du mil, plus rémunérateur.

Pour tenter de retrouver le chemin du bonheur, ils décident d'aller consulter le diable qui trône sur la montagne rouge. Après un rituel, la devineresse se dévoile : c'est la femme-diablesse, qui leur déclare que leurs ennuis sont terminés : ils vont rencontrer une voiture sembalble à la leur et en profiter pour regagner Niamey.

Effectivement, le soir, une 2 CV semblable en tous points à la leur avec des occupants leur ressemblant comme deux gouttes d'eau s'arrête près de leur feu de camp. Lam Damouré et Tallou s'emparent de la voiture des diables, en bien meilleur état que la leur, et réussissent enfin à se procurer une vingtaine de poulets à acheter.

Sur le chemin du retrour, il leur faut encore ruser pour échapper à la police qui, à cause d'une épidémie, a interdit le "poulet gourmand". Ils parviennent tout de même à écouler leur marchandise au prix fort sur un marché. Damouré interroge Lam sur ces intentions : repartir vers de nouvelles aventures, declare celui-ci, dut-il aller jusqu'au ciel.

En 1982, Jean Rouch gardait un souvenir malicieux de son dernier film réalisé huit ans plus tôt :

"Ce film a peut-être été le plus drôle à faire. Lam avait proposé un documentaire sur le commerce du poulet, nous décidons d'en faire un film de fiction réalisé par Dalarou, nouveau réalisateur multinational et tricéphale : Damouré Zika, Lam Ibrahima Dia, Jean Rouch. Nous avons été dépassés dans l'improvisation par les incidents : la voiture de Lam n'avait ni freins, ni phares, ni papiers. Ses pannes continuelles modifiaient sans cesse le scénario prévu (…). Alors l'invention était continuelle et nous n'avions aucune autre raison de nous arrêter que le manque de pellicule ou le fou rire qui faisait trembler dangereusement micros et caméras."

Dans la grande tradition du road-movie, le film manifeste une humanité joyeuse à l'écart des chemins balisés du quotidien fut-il aussi dépaysant pour nous que celui du Niger. Damouré dont on ne comprend pas bien les motivations de départ et que l'on soupçonne avec ses compagnons de vouloir profiter commercialement de leur projet finit le soir autour du feu de camp par révéler sa véritable motivation. Il est marié et subvient difficilement aux besoin de ses deux enfants. Dans la brousse je suis libre alors on continue S'il est parti c'est pour prendre des vacances et manger du poulet le soir avec des amis. S'explique ainsi beaucoup mieux la folie qui le gagne dès que la femme diablesse apparaît, il s'y abandonne avec autant de délice qu'il en met à se baigner dans le fleuve Niger.

L'humour constant se retrouve dans la façon de se moquer des gendarmes (esquive lors du stop grillé, des papiers demandés, du pont à traverser) ou de toute autre autorité bienveillante (l'expert en développement) voir les chefs de village outrés de retrouver Tallou dans la case d'une femme marié. il se retrouve dans les avanies de Patience la si bien nommée voiture de Tallou ( pneu transporté sur la tête ou réparations et tous genres) ou de faire intervenir des éléments du conte

Rouch souligne la dimension du conte en faisant intervenir trois fois la diablesse (Chasse les éléphants puis les hippopotames puis devient prêtresse) et trois fois aussi le passage du fleuve Niger ( tirée, flottants sur des pneus puis transportée en pièces détachées.

Sous son aspect modeste, ludique et potache, Cocorico ! Monsieur poulet se transforme peu à peu en grand film d'aventure alternant les poses près du feu de camps pour manger ou faire refroidir Patience et les envolées lyrique de Patience traçant la route sous la lumière magnifique de l'Afrique. S'étant joués des diables sans doute peuvent-ils, comme le jette Lam, continuer leurs aventures jusqu'au ciel.

Jean- Luc Lacuve le 01/03/2007.

critique du DVD
Editeur : Montparnasse, 2007.

Suppléments : Bataille sur le grand fleuve (1950, 33 min). Cimetières dans la falaise . Tous les films sont présentés par Jean Rouch et proposés en version sous-titrée anglaise.

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