La dernière reine de France, très mise en valeur par son époux Louis XVI, fut également la plus représentée de toutes les souveraines. Ces tableaux ont beaucoup fait pour la légende posthume de Marie-Antoinette. Ils la représentent non pas comme la femme futile que la légende révolutionnaire s’est plu à donner d'elle, mais comme une femme majestueuse et humaine à la fois, parfaitement à sa place dans son rôle de reine et de mère, même si le portrait à la rose la montre occupée à des activités plus futiles. Cependant, de son vivant, la multiplication des portraits contribua en partie à alimenter sa grande impopularité. Elisabeth Vigée-Lebrun elle-même paya le fait d’avoir représenté la reine et dut s’exiler à travers l'Europe, où elle poursuivit sa brillante carrière de portraitiste.
Née en 1755, Marie-Antoinette de Lorraine-Habsbourg, archiduchesse d’Autriche, devint reine de France en 1774 lorsque Louis XVI accéda au trône. Dès 1778, sans attendre qu’Elisabeth Vigée-Lebrun soit élue à l’Académie royale de peinture et de sculpture, et malgré la cabale menée par madame Labille-Guiard, la reine en fit son peintre attitré. Du portrait officiel de 1778, plusieurs répliques avec variantes sont connues, dont deux conservées à Versailles. La reine se présente avec la tête tournée ou non. Dans le premier portrait qu’exécuta l’artiste, la reine apparaît un peu guindée dans sa robe trop riche. Elle a adopté une posture plus officielle que proprement humaine, avec à ses côtés la couronne de France. Le portrait original était destiné à son frère Joseph II, empereur germanique, et Mme Vigée-Lebrun en réalisa deux autres exemplaires, l’un pour Versailles, l’autre pour la tsarine Catherine de Russie.
Pas moins d’une dizaine de portraits furent exécutés. Avec le temps, le style de Mme Vigée-Lebrun s'est fait moins raide, ses relations avec la reine étant devenues moins officielles et certainement plus amicales. Les portraits suivants montrèrent une souveraine plus humaine, revêtue de vêtements plus simples, bien que très luxueux par leurs qualités ou leurs couleurs parfois vives.
Le célèbre portrait de Marie-Antoinette à la rose qui est en buste long fait figure d’exception parmi tous les portrait en pied. Le style doux et moelleux de Vigée-Lebrun, d’un néoclassicisme atténué, convenait certainement mieux à la souveraine que le solide réalisme d’Adélaïde Labille-Guiard. Elle souhaitait être flattée et la jeune artiste, du même âge que la reine, fut la seule à réussir ce pari.
Si le modèle original, dit « en gaulle », a disparu, cinq répliques avec variantes (chapeau, robe de mousseline, etc.) en furent tirées par l’artiste. Ce portrait flatteur, très intimiste, montre une souveraine qui bien que très digne, est revêtue très simplement d’une robe de soie grise et confectionne un bouquet. Rien d’officiel dans ce portrait, où la reine est présentée seule, vraisemblablement dans les jardins de Trianon ou du Hameau, où elle aimait à mener une vie champêtre, loin des complots de la cour.