Entre 1922 et 1932, Kurt Schwitters compose son poème phonétique Ursonate, qu'il publie dans le 24e et dernier numéro de la revue Merz. Cette œuvre reprend la structure d'une sonate dans un esprit purement dadaïste. En guise d'instrument la voix et en guise de notes des consonnes et des voyelles. Elle est aussi appelée sonate de sons primitifs (Sonate in Urlauten)
La mise en partition de cette œuvre est quant à elle dans l'esprit du Bauhaus. Elle fut réalisée par le typographe Jan Tschichold, un des fondateurs de la typographie moderne. Il recourt à des symboles et des typographies pour rendre compte des différents éléments constituant la sonate. Un filet épais isole les indications relatives à la mesure des temps et se répéte à chaque page, un filet fin indique le passage d'un mouvement à l'autre etc.
« Dans un rythme libre, les paragraphes et la ponctuation sont utilisés comme dans la langue, pour un rythme rigoureux, les barres de mesure ou les indications de mesure apparaissent par la division proportionnée en sections spatiales égales de l'espace typographique, mais pas de ponstuation. Donc ,. ;!?: ne sont lus que pour la tonalité. » K. Schwitters, Merz n°24
Le livre de Gérard Lebovici, Merz, reproduit fidèlement la partition originiale. S’agissant d’une partition de texte chanté, Schwitters s’adresse ainsi au lecteur (pp.189-193) :
Explication des signes
«(…) Dans un rythme libre, les paragraphes et la ponctuation sont utilisés comme dans la langue, pour un rythme rigoureux, les barres de mesure ou les indications de mesure apparaissent par la division proportionnée en sections spatiales égales de l’espace typographique, mais pas de ponctuation. Donc,.;!?: ne sont lus que pour la tonalité.
Naturellement, l’utilisation courante des lettres de l’ancien alphabet romain ne peut donner qu’une indication très incomplète de la Sonate parlée. Comme pour toute partition, de nombreuses interprétations en sont possibles.»
«Tschichold utilise des tirets et filets ainsi que de la police Futura. Au niveau des filets, Tschichold se sert d’un contraste entre filets fins et épais, le filet épais isolant les indications relatives à la mesure des temps et se répétant à chaque page, et des filets fins, moins violents, servant à indiquer le passage d’un mouvement à un autre. Un troisième type de filet, encore plus léger, est constitué de successions de petits points, indiquant les changements de temps. Mais surtout, il se sert d’une opposition entre deux types de polices (à empattements et bâtons), le premier destiné au texte à déclamer, et la seconde, en l’occurrence la police Futura, servant pour toutes les sortes d’indications.»