La toile illustre l'un des épisodes de l'histoire de Callisto évoqué par Ovide (II, 401-495) dans Les Métamorphoses. La chaste déesse Diane, qui imposait absolument cette qualité à ses nymphes, découvre que l'une d'entre elles, Callisto, est enceinte. Celle-ci, séduite par Jupiter qui, pour la surprendre, avait pris les apparences de la déesse chasseresse, a en effet enfreint son voeu. Diane, furieuse, la chasse de son cortège et Junon, jalouse, la change en ourse. La légende veut que Callisto poursuivie par la meute de Diane soit finalement sauvée par Jupiter qui la transforme en constellation. Le fils de Callisto, Arcas, fut sauvé et devint l'ancêtre des Arcadiens.
Ici, Diane, entourée de trois nymphes et de deux chiens, désigne d'un doigt accusateur la jeune coupable et ordonne à deux de ses suivantes de la déshabiller afin de contrôler sa grossesse. La malheureuse se débat, honteuse, cherchant à fuir, entre les bras de ses compagnes. Au milieu du paysage, suggéré par un coteau, est allongé un homme barbu, la main posée sur une urne fluente et symbolisant un fleuve.
Donné à Schiavone dès 1826, l'attribution du tableau n'a pas été remise en cause depuis lors. Richardson (1980) a proposé de dater le tableau vers 1548-1549, c'est-à-dire la période de maturité de l'artiste, où il réussit à synthétiser la maniera héritée de son maître Parmesan et l'équilibre des grands vénitiens. Ce tableau allongé, en frise, de petit format, appartient à un type d'oeuvres assez répandu à Venise au XVIème siècle et utilisé pour décorer des lambris ou des panneaux de meubles. Schiavone a justement exécuté au début de sa carrière de nombreux décors pour des cassoni (coffres). A la fin du XVIIIème siècle, dans la collection Algarotti, l'oeuvre était accompagnée d'une composition de même format, Salomon et la Reine de Saba, ainsi que de deux autres petits tableaux Callisto tirant à l'arc (?) et Jupiter embrassant Callisto, ces deux dernières peintures, qui composaient sans doute un seul et même cycle avec celle d'Amiens, sont aujourd'hui conservées à Londres (National Gallery).
Notice de Mattthieu Pinette