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Bien que la provenance de l’œuvre soit encore inconnue, compte tenu de sa présence dans le plus ancien inventaire de la collection de Scipione Borghese, il est probable que le cardinal l’ait achetée peu de temps après son exécution ou même l’ait commandée directement. Comme on le sait, Scipione tenait en grande estime l’art de l’école de Caravage et patronnait de nombreux artistes contemporains.
La toile peut être datée d’environ 1612, époque de l’arrivée du jeune Ribera à Rome ; sa présence dans la ville est en effet attestée avec certitude dès 1613, bien qu’il soit tout à fait probable que son séjour à Rome ait commencé l’année précédente. Son séjour de quatre ans dans la Ville Éternelle coïncide avec son virage vers le style de Caravage, dont l’influence est certainement évidente dans l’œuvre en question. Cette chronologie est confirmée par les affinités stylistiques avec le Saint Jérôme de la collection Tanenbaum de Toronto (actuellement conservé dans les réserves de l’Art Museum of Ontario), qui date d’environ 1615 ; une seconde version de ce tableau est conservée aux Trafalgar Galleries de Londres. Les similitudes entre le Mendiant et le Saint Jérôme sont évidentes dans le rendu naturaliste des traits et des expressions du visage ainsi que dans la touche libre et effilée. Spinosa avait déjà relevé ces caractéristiques au début des années 1990, lorsqu’il attribuait encore les deux œuvres à Crabeth.
La datation précoce de l’œuvre en fait un modèle pour tout ce genre, qui connut un grand succès à Rome à partir de la deuxième décennie du XVIIe siècle. À partir de cette période, les peintres produisirent une multitude de représentations de sujets humbles, tels que de modestes ouvriers ou de pauvres mendiants, représentés individuellement ou en groupe ; la même tendance se manifeste dans les milieux artistiques du nord de l’Europe.
Le Mendiant de Ribera est l’un des produits de la plus haute qualité de ce courant révolutionnaire, surtout grâce à la manière dont il aborda son sujet, lui conférant la même monumentalité traditionnellement réservée aux personnages de haut rang, tels que les philosophes et les saints. Selon Papi, cette œuvre rappelle la série des Apôtres de Cussida (achetée plus tard par Gavotti), que Longhi attribuait au Maître du Jugement de Salomon (R. Longhi, « Ultimi studi sul Caravaggio e la sua cerchia », Proporzioni, I, 1943, p. 58). Papi, qui soutenait fortement l’identification du Maître avec le jeune Ribera, y voyait la plus forte ressemblance avec le Saint Barthélemy de la série (Fondazione Longhi, Florence) : selon lui, le Mendiant partage la même frontalité puissante et le même regard fixe, éléments qui font une profonde impression sur le spectateur . Le personnage émerge au premier plan d’un fond sombre et indéfini. Il est frappé par un rayon de lumière provenant du coin supérieur gauche ; elle illumine ses vêtements en lambeaux et son visage profondément marqué, caractérisé par une force expressive extraordinaire.