Construite après la conquête normande de l'Angleterre, l'abbatiale Saint-Étienne bénéficie des richesses que le duc-roi tire des territoires conquis. Elle est consacrée en 1077 par l’archevêque Jean d'Ivry.
La haute façade ne comporte presque aucune décoration, si ce n'est de minces voussures autour des portails et une croix sculptée. La façade de l'abbatiale, qui frappe d'abord par son épure et sa rigueur, est le premier exemple d'une formule appelée à dominer la construction des plus grandes églises d'Occident : la "façade harmonique normande". Celle-ci consiste en deux tours occidentales d'élévation identique plantées sur la première travée des collatéraux, alignées sur la porte principale de la nef, de sorte à créer une façade rectiligne.
Les trois niveaux inférieurs de la façade forment un bloc carré, contribuant à l'aspect massif de l'ensemble. Excepté quelques ornements géométriques aux voussures des trois portails et au pignon de la nef, la nudité de ce bloc est frappante : l'impression d'ensemble est soumise aux lignes architecturales, aux quatre contreforts massifs d'abord, qui accompagnent le regard du sol vers les tours ; aux dix grandes fenêtres ensuite, dont la base est prolongé par des cordons saillants. Les tours se divisent en trois étages de hauteur égale dont la progression accentue l'élan du regard vers le ciel. L'étage inférieur est aveugle et compte sept arcatures étroites sur chaque face. Le second niveau est plus orné et moins dense : cinq arcatures dessinées par des demi colonnes jumelées. Le troisième niveau, enfin, est plus aéré et largement décoré : deux grandes baies comportent chacune deux baies séparées par une colonne ; les écoinçons sont décorés et les archivoltes moulurées.
Deux flèches gothiques au XIII siècle (hauteur 80 et 82 mètres) coiffent ses deux tours romanes. Elles consistent en deux octogones effilés posées sur des bases carrées, garnie de huit clochetons eux-mêmes octogonaux pour la tour Nord (triangulaires pour la tour Sud). Les tours symétriques sont de plus en plus richement décorées au fur et à mesure de leur élévation.
Le chevet est construit au XIIIe siècle par un certain maître Guillaume dont la pierre tombale portant une inscription en lettres gothiques se trouve sous le mur gouttereau. Il est reconstruit au XVIIe siècle après l'effondrement, en 1566 de la flèche de la tour-lanterne. Les quatre clochetons surmontés de flèches lui donnent cet aspect original que l'on retrouve à Coutances et Bayeux.
La nef est longue de 56 mètres, elle constitue un parfait exemple du style roman normand. Chacune des huit travées, dont la première est occupée par l'orgue, comprend trois niveaux : celui des grandes arcades du rez-de-chaussée, celui des tribunes au premier étage, celui des fenêtres hautes (la claire-voie) au second étage. Aux niveaux inférieur et intermédiaire, les arcades sont en plein cintre, à double rouleau (la voussure externe est moulurée) ; les fenêtres hautes offrent, pour deux travées, quatre arcatures décorées, symétriques deux à deux. L'unité élémentaire de cette élévation est de deux travées, subtilement délimitées par l'alternance des supports (pile faible constituée d'une simple demi colonne, recevant l'arc-doubleau de la voûte ; pile forte constituée d'une demi colonne reposant sur un dosseret, supportant un doubleau et deux ogives). L'étage des tribunes a pour but, par sa voûte en demi-berceau, de soutenir les murs de la nef. Au niveau des fenêtres, une galerie, la « coursière » permet de faire tout le tour de l'abbatiale.
À l'origine couverte d'une charpente en bois (plafond plat ou voûte en berceau comme dans la nef du Mont-Saint-Michel ?), la nef a reçu, à partir de 1115, des voûtes sexpartites, sur croisée d'ogives en plein cintre. Ces voûtes seraient, après celles de Durham (Angleterre) et Lessay (Manche) édifiées autour de 1100, les plus anciennes voûtes sur croisées d'ogives de France.
Le transept comporte deux croisillons au fond desquels se trouvent une tribune et donnant sur une absidiole, la croisée supporte une tour-lanterne octogonale où courent des arcatures dessinées au premier étage par des colonnes cylindriques.
Le tombeau de Guillaume le Conquérant (mort le 9 septembre 1087) était placé au milieu du chœur (peut-être sous la tour-lanterne). Son fils, Guillaume le Roux, fait construire un monument en marbre, surmonté d'un gisant. Ce monument est détruit en 1562 par les huguenots. En 1742, le tombeau est réduit à un simple caveau recouvert d'une pierre tombale situé dans le sanctuaire. À la Révolution, la pierre tombale du duc Guillaume est à nouveau détruite. Elle est remplacée en 1802 par la pierre tombale visible actuellement.