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(1834 - 1896)
Préraphaëlite

William Morris, né le 24 mars 1834 à Walthamstow, Essex (aujourd'hui dans le borough londonien de Waltham Forest) et mort le 3 octobre 1896 à Hammersmith, Londres, est un fabricant, designer textile, imprimeur, écrivain, poète, conférencier, peintre, dessinateur et architecte britannique, célèbre à la fois pour ses œuvres littéraires, son engagement politique libertaire, son travail d'édition et ses créations dans le domaine des arts décoratifs, en tant que membre de la Confrérie préraphaélite, qui comptent parmi les sources du mouvement Arts & Crafts qui eut, dans ce domaine, l'une des influences les plus importantes en Grande-Bretagne au xxe siècle.

Tout au long de sa vie, William Morris écrit et publie des œuvres de poésie et des romans et traduit des textes anciens du Moyen Âge et de l'Antiquité. Son travail littéraire le plus connu en français est l'utopie Nouvelles de nulle part (News from Nowhere), écrite en 1890. En contribuant à la fondation de la Socialist League en 1884, William Morris joue un rôle clé dans l'émergence du courant socialiste britannique, bien qu'il ait renié ce mouvement à la fin de la même décennie. Il consacre la fin de sa vie aux travaux de l'imprimerie et maison d’édition Kelmscott Press, qu'il a fondée en 1891. L'édition Kelmscott de 1896 des œuvres de Geoffrey Chaucer est aujourd'hui considérée comme un chef-d'œuvre de conception éditoriale.

Le travail 1865 Manchester, Manchester Art Gallery

William Morris est né à Elm House, Walthamstow, le 24 mars 1834, troisième enfant et premier fils d'une famille de moyenne bourgeoisie aisée d'origine galloise. Son père, William Morris, travaillait comme agent de change pour la compagnie Sanderson & Co., à la Cité de Londres. Sa mère était Emma Morris, née Shelton, fille de Joseph Shelton, professeur de musique à Worcester. Sans être un prodige, William Morris reste un enfant délicat et studieux. « Il ne fut guère remarquable que par son grand amour de la lecture. » Il apprend à lire très jeune et, dès l'âge de quatre ans, il est émerveillé par les Waverley Novels de Walter Scott qu'il a déjà lus en grande partie et qui donnèrent l'impulsion à ses poèmes d'inspiration médiévale. Il a six ans en 1840, lorsque sa famille s'installe à Woodford Hall, ouvert sur de plus grands espaces. Des cours trop réguliers lui sont épargnés afin de ménager sa santé, ce qui lui permet de mener une vie de plein air qui lui donne force et vigueur. Vêtu parfois d'une panoplie de chevalier en armure, il se promène à cheval et apprend par l'observation de la nature dans la forêt d'Epping.

« La forêt lui fut une amie, il ne tarda pas à en connaître tous les sites, tous les chemins, il essayait d'y surprendre les troupeaux de daims qui y vivent. En retour elle l'initia à la beauté. Inconsciemment sans doute, mais sûrement, il commença à sentir le charme profond de la nature, et toute son œuvre de poète et d'artiste devait en être pénétrée. Sans comprendre toute la mystérieuse beauté de la forêt il apprit à l'aimer. Elle fut son premier maître, un magister point pédant, sans rien de rébarbatif ni d'austère, dont les leçons s'égayaient de chants d'oiseaux, de soleil et de parfums sous les arbres, et qui lui apprit à regarder de près et avec sympathie les bêtes et les plantes. C'est peut-être à cette habitude d'observation précise, contractée dès l'enfance qu’est due la frappante vérité de ses décorations florales.

Lecteur vorace, il lit tout ce qui lui tombe sous la main et se passionne pour Les Mille et Une Nuits ou les illustrations de l'herbier de John Gerard. Jusqu'à l'âge de neuf ans, il suit l'enseignement donné par la gouvernante de ses sœurs, avant d'entrer dans une école préparatoire pour « jeunes gentlemen » de Walthamstow, en 1843, où il travaille médiocrement pendant quatre ans. Il a treize ans en 1847 lorsque son père meurt, laissant la famille dans une grande aisance matérielle. Les Morris quittent Woodford, jugée désormais trop grande, et le jeune garçon entre à l'internat de Marlborough College en février 1848, où son père avait payé pour qu'une place lui soit réservée. Pendant les trois années où il y reste, il tire peu de profit des leçons de français, de latin ou de mathématiques. Il révèle en outre un certain penchant pour l'anglo-catholicisme qui lui donne la vocation de devenir prêtre. Ses résultats sont médiocres et, à Noël 1851, sa famille le retire de Marlborough et le confie aux soins d'un tuteur privé, le révérend F. B. Guy, qui dispose d'une année pour le préparer à l'entrée à l'université.

Après des études universitaires de théologie à Exeter College d’Oxford, il songe à entrer dans les ordres. C'est à Exeter College qu'il fait la connaissance d'Edward Burne-Jones. Les deux hommes se lient d'une amitié qui dure toute leur vie et que cimente une passion commune pour la création artistique.

La lecture de Thomas Carlyle, de Charles Kingsley persuade Morris de se consacrer à l’art et à travers John Ruskin il découvre le Dictionnaire d'Eugène Viollet-le-Duc. Étudiant en architecture puis en peinture, sa rencontre avec Dante Gabriel Rossetti et les artistes de la Confrérie préraphaélite en 1856 le détermine à consacrer sa vie aux arts décoratifs, à la fois comme créateur et comme homme d’affaires. En avril 1859, il se marie avec le modèle Jane Burden, dont il a deux filles : Jane Alice Morris, dite « Jenny », née en janvier 1861, et Mary « May » Morris, née en mars de l'année suivante.

La contradiction entre les aspirations socialistes utopiques de William Morris et ses activités de créateur d’objets de luxe, accessibles uniquement à une clientèle de grands bourgeois victoriens, reste problématique encore aujourd'hui. L'explication peut se trouver dans les théories socialistes elles-mêmes, qui visent à démocratiser l'art et ses savoir-faire sous toutes ses formes afin que l'ouvrier devienne artisan et artiste. La pleine réalisation de l'être humain ne peut s'effectuer, selon Morris, que dans la création d'objets et de meubles beaux et pratiques. Soustraite aux impératifs impérialistes de rentabilité et de rapidité, la fabrication des éléments nécessaires à la vie quotidienne devient un plaisir en soi et la raison d'être d'une vie libre et épanouissante.

Pour Morris, le système fondé sur le commerce et le profit qui s’est imposé à la fin du xixe siècle avait dévasté les arts décoratifs ou « mineurs », en portant atteinte tant à leur qualité qu’à leur statut dans la société. Ce malheur peut paraître très anodin dans la litanie des horreurs de la société victorienne. Pourtant, c’est sur ce sentiment profond des causes de cette dégradation et de ses effets sur la possibilité de la camaraderie, de la créativité et du bonheur humain que Morris fondera toute son analyse politique.

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