Cette toile, qui représente Claude Monet alité pour une blessure à la jambe, a été peinte lors de l'été 1865. Au début de cette année, Bazille partage son atelier avec Monet. Au printemps, ce dernier se rend à Chailly, dans la forêt de Fontainebleau, faire des études en plein air pour son Déjeuner sur l'herbe. Il demande instamment à Bazille de le rejoindre pour servir de modèle. Celui-ci arrive enfin durant l'été, peu de temps avant que Monet, victime d'un accident, ne doive suspendre son travail.
Les personnages des toiles de Bazille sont généralement immobiles, souvent même un peu figés. Son goût pour un certain statisme semble parfaitement convenir à ces circonstances particulières, qui voient Monet réduit à l'inaction dans sa chambre d'auberge.
Se souvenant d'avoir été étudiant en médecine, c'est Bazille lui-même qui a fabriqué une installation compliquée pour assurer le confort de son ami. Faisant visiblement office de contrepoids, un récipient est suspendu au bout de deux cordes, tandis que des couvertures superposées servent à surélever la jambe blessée.
Bazille, dont l'oeuvre se situe entre le réalisme de Courbet et l'impressionnisme naissant, rend compte de l'évènement sans concession. Dans le désordre du lit, on distingue clairement la blessure rougeoyante sur le tibia de Monet tandis que son visage exprime l'accablement d'être ainsi immobilisé. L'intimité de la scène atteste de liens d'amitié qui unissent les deux hommes.